Conours n°6 - VOTES (jusqu'au 15/01/2010)

L'eau avait coulé sous les ponts. Maintenant, elle avait y avait gelé. Elle y stagnait, donc, par définition, puisqu'elle ne pouvait plus se déplacer, à cause de sa forme solide. L'eau ne coulait pas sous les ponts, et la plaie était béante. Immense, dans un cœur meurtri jusqu'à l'âme, dont les battements mourraient en silence, lentement, alors que la torpeur du froid glacial s'emparait de son corps. La souffrance physique n'était rien, comparée à la souffrance qu'elle pouvait endurer, à l'intérieur. Elle était morte, sans âme, elle ne vivait plus, elle survivait, elle n'avançait pas, elle mourrait encore. Chaque seconde loin de lui était une nouvelle mort, un nouveau déferlement de terreur, horreur, douleur, et surtout de détresse. Une détresse immense. Tout n'était plus que froid, et cri muet de souffrance. Tout n'était plus que noir, blanc. Sans valeur. Sans saveur. Sans raison de rester ici-bas. Autant mourir. Renoncer à la vie, cette vie qui faisait de nous ce que l'on était réellement...

**

Une boule de neige s'écrase contre un dos rigide, et une volte-face trop rapide s'ensuit, faisant trébucher la silhouette dans la masse blanche pour laisser son corps s'y étaler. Un éclat de rire raisonna dans le silence de la montagne blanche, un éclat de joie. La silhouette se releva doucement, elle aussi secouée de soubresauts de rire. Le visage de cette personne se lève pour chercher des yeux celle qui lui avait fait cela. Son cœur danse, son visage respire la sérénité et la tendresse.

C'était merveilleux, magnifique, tellement étrange et pourtant magique et surprenant. C'était un sentiment enfoui jusque là, enfoui à cause de tellement de circonstances, que la beauté de l'instant et sa durée n'en devenaient que plus grands et plus forts. Les rires se croisaient, s'arrêtaient dans un baiser pour reprendre de plus belle. Des sauts de gaieté, de joie, de bonheur, dans tout ce blanc, dans toute cette pureté. Et ce visage, magnifique... Et ce visage, tellement tendre, tellement doux et attirant... Un sentiment, que rien ne pourra jamais les séparer, parce que le bonheur se construit à deux, et qu'il était impossible qu'un moment si juste et beau eût une fin...

**

Un cri, déchirant, fend l'atmosphère légère et pourtant de glace, sur un pont où l'eau ne coule plus. Le temps n'est rien, n'efface pas les douleurs, puisque l'eau ne coule plus. L'eau ne coule plus. L'eau ne coulera plus, dans un monde où le froid prenait tous ses droits, en tant qu'élément naturel. L'eau ne coule plus...

Une détresse immense s'empare de son corps, de son coeur, de son âme. Elle bascule. Ivresse d'un dernier instant, adrénaline d'un vol, soulagement d'un choc. L'eau glacée pénètre ses poumons, tandis que ses membres brisés ne peuvent plus battre cette dernière. Les morceaux de glace, par l'impact, sont vifs et cognent contre sa tête. Elle bascule.

L'émotion implose.
Libre.

La neige blanche, froide, remplacait l'étendue verte de l'été.
Les arbres, majestueux, recouverts d'une couche de glace fraiche.
Les chants s'élevaient dans la ville.
Calmes, joviales, ceux-ci apaisait les gens.

Douce lumière qui s'élevait dans le ciel, éclairant les enfants, jouant gaiement.
Les soucis s'oubliaient, l'instant d'une saison.
D'une festivitée, souriant à chaque personne.
La joie enfantine se répandait partout.

Chaque sourire était un espoir.
Et cet espoir ne cessait de s'agrandir au fil des jours.
Toujours plus grand, toujours plus haut, toujours plus fort.
Plus ils y croiyaient, plus c'était présent.

La douceur des mots,
La chaleur des câlins,
La beauté d'un sourire.
Tout portait à croire que c'était le plus beau temps.

La préparation faites, plus d'animaux il y avaient, tous étaient partis.
Lentement, profitant des derniers instants.
Quiétude était en eux.
Vie était autour d'eux.

La musique jouait dans la maison.
Adultes qui tournoyaient, dansaient, au rytme de la mélodie.
Parfois rapide, parfois lente.
Les enfants rêvaient d'être comme eux.

La forêt, pleines de bucherons.
Travaillant fort, pour arriver à combler les familles.
La force était en eux,
La joie était autour d'eux.

Une larme tombait sur une joue.
Elle regardait tout.
Pour la dernière fois.
Juste un instant.

Lentement,
Fermant les paupières.
Pour un sommeil reposant.
Et infini.

Le paysage est si blanc, si pur, qu'il en paraît irréel. La jeune fille entrouvre à peine ses fines lèvres, que déjà des flocons s'engouffrent dans la chaleur de sa bouche, réduits à l'état de rêves. Le froid rougit la peau de quiconque pénètre son domaine, et pourtant, bon nombre de personnes osent le défier. Non pour le combattre, mais pour profiter de son incroyable apparition hivernale. La neige a cessé de tomber, et pourtant, le sol reste couvert de ces étoiles neigeuses. La jeune fille avance sur la pointe des pieds, de peur de briser cette blancheur, si belle, qui s'épanouit sous ses pieds. La féerie de cet instant paraît magique, digne d'une carte postale terrienne. Car ici, rien ni personne ne se sent sur Terre. Toute pollution et tout bruit ont déserté l'environnement, que seule cette saison a le don de mettre en fuite. Les bruissements des feuilles et les chants des oiseaux encore dehors à cette époque de l'année apaisent l'atmosphère, la rendant légère. La jeune fille tournoie, se joue du vent et des bourrasques, les transformant en alliés, en amis. Son chapeau est happé par le courant d'air qui parcourt l'endroit, et s'envole, sans plus retomber. Un sourire s'épanouit sur son visage, ses yeux s'illuminent, et son rire cristallin se fait entendre, doux tintement dans l'air ambiant. Si le vent lui a prit son chapeau, plus rien n'est à redire, il a gagné. Se jouer de tout, accepter les évènements comme ils viennent... En harmonie avec la nature et avec soi.

Il neige.
Au dehors, et dans mon cœur, tout est blanc, tout est froid.
Je fais un pas, puis deux. Doux allié, la neige plie sous mes pas, se module, s’adapte à mes envies.
Les flocons dansent autour de moi, mais je ne les vois pas. Car dans ma tête, les mêmes flocons dansent, la même folie, la même beauté, et tout s’assimile.
Je continue de marcher, lentement d’abord, comme avec faiblesse, puis, peu à peu, mon rythme accélère alors que la neige se fait plus drue, et je cours, je cours vers nulle part, sous le mortel baiser de la blanche envoûteuse.
Flocon parmi les flocons, plus blanc que la neige, je suis invisible, je suis fort aussi, je domine tous les autres humains, enfin.
Je suis attaché, mais qu’importe ? Aujourd’hui, je suis infiniment plus puissant que tous ces êtres insignifiants.
Aujourd’hui, je ne fais qu’un avec la neige.
Mes pas ralentissent, je faiblis, mon souffle saccadé brise le silence réconfortant de la nature, et je me sens coupable, tellement coupable.
J’ai déçu les hommes, mais je ne veux pas décevoir ma Mère.
Alors, pour calmer la folie de mes poumons et de mon âme, je m’assied, seul dans cette immense étendue blanche.
Maintenant, je vais mourir. Je le sais, mais qu’importe ? Ils ne me retrouveront jamais ici, la neige me protège, et les flocons dansent pour moi. Je suis à l’abri des humains.
J’aime autant mourir de la main de ces sirènes froides, attiré par leur chant, et réconforté par leur toucher.
Et alors, quand elles m’auront enveloppé de leurs froids baisers, je disparaîtrais des yeux de ce monde, et, moi aussi, je deviendrais neige.
Cette fois, je sens au fond de moi que ce n’est pas folie, mais vérité.
La nuit tombe, mes yeux se ferment.

Peut-être la vie n’a t’elle aucun sens. Peut-être ne vaut t’elle pas vraiment la peine. Comment savoir? Comment savoir alors que la vie est le plus grand mystère du monde? Pourquoi la vie ne se livre t’elle pas aux humain, n’offre pas ces secrets? Je ferme les yeux. La neige tombe sur les plaines de chagrin qui s'étendent devant moi. Mes pleurs se mêlent à la lune et mes sanglots aux étoiles. Il n’est plus la. Par mon choix, il m’a abandonné. Sans rien dire. Avec ce regard de glace. Ce regard de glace que je pensais pourtant avoir réussis à faire fondre. Maintenant je n’y peux plus rien. J’ai fait mon choix. À moi de l'assumer. À moi de poursuivre ma vie seule, alors que le sens la quitté.

La nature revêt un grand manteau blanc alors que les plaines qui s’étendent devant moi, majestueuses et impressionnantes, se chargent d’un poids qu'elles n’ont pas demandé. Mon âme se ternit comme l'herbe sous le froid. Mes larmes chaudes tombent sur la neige. Le fardeau se décharge lentement. Trop lentement. Combien de temps? Combien de temps avant de pouvoir penser à lui sans versé de larmes? Combien de temps avant de cesser d’espérer, d’admettre la vérité? Il n’était plus la. Lui que je pensais aimer, que je crois toujours aimer. Lui qui à ouvert les portes de mon cœur et de mon âme, lui qui, je m’en rends compte, ces simplement servit de moi pour tendre vers le chaos, lui qui n’a jamais réussi à s’attacher, en bon envoleur. Chasseur de marchombre. Voleur d'âme.

Je m’arrête devant un ruisseau qui tente de s’accorder au rythme lent de l'hiver. Son bruit se ternit lentement, la surface se solidifie. Mon cœur se referme sur une douleur insoutenable. Une douleur qui ne semble vouloir s’arrêter, comme ces morceaux de nuages fondant lentement sur ma tête. Je ferme les yeux. J’entre dans l'eau. Je pleure. Je pleure encore et toujours. Mais mes larmes sont cachées, mon cœur c’est fermé. Peut-être à jamais. Comment vivre? Comment vivre sans sens, sans amour et sans joie? Comment vivre dans la haine et la colère? Je respire lentement. Je respire l’hiver qui s’installe en Gwendalavir. J’expire. Ma peine semble s’apaisé. Un peux. Je sors de l'eau, m’étend dans la neige, regarde la neige tourbillonner. Je me calme et enfin, je ferme les yeux et je m'endors.